Ces petits riens qu’on prend pour acquis

Mel. En Asie.

Au cours de notre voyage, nous avons pu constater à quel point nos vies de nord-américains sont douillettes et luxueuses. Vous vous sentez déprimés? Les profils de vos amis sur les réseaux sociaux regorgent de photos de magnifiques vacances, de repas gastronomiques, d’idylles parfaites ou de rénovations récentes qui vous rendent verts de jalousie? Lisez cet article, il vous fera probablement du bien! Il vous rappellera au contraire chacun des privilèges incroyables dont vous bénéficiez. Prenez le temps de méditer sur chacun d’eux et vous vous sentirez peut-être incroyablement choyés par la vie!

Votre vie est exempte de catastrophes naturelles violentes

Au Québec, comme en Amérique du Nord et en Europe, le tremblements de terre violents, les volcans et les tsunamis sont des évènements fort peu fréquents. Au Québec, les ouragans et les tempêtes violentes sont également rares.

Vous n’attraperez pas la malaria dans votre lit

Les risques que vous attrapiez la malaria ou une autre maladie transmise par les insectes sont relativement faibles. Vous n’avez pas besoin de dormir sous un filet ni de prendre des médicaments pour éviter de tomber malade.

Vous habitez dans une maison

Vous avez une maison. Comme bien d’autres népalais, la famille de cette jeune fille a perdu sa maison lors du tremblement de terre de 2015. Quatre ans plus tard, ils habitent encore sous une tente.

Votre maison est chauffée

Votre maison est probablement chauffée à environs 21˙C, même lorsqu’il fait -20˙C à l’extérieur. Votre demeure est isolée et vous avez accès à un système de chauffage. Vous n’avez pas besoin de porter une tuque à l’intérieur en hiver.

Votre toit ne coule pas, ou du moins pas beaucoup

Chez notre ami Motup, lors d’une journée où il avait neigé et où la neige fondait, le toit de la maison en terre séchée s’est mis à couler de partout, mouillant matelas, meubles et tapis.

Vous avez l’électricité

Vous pouvez compter sur un système de distribution électrique robuste qui ne flanche que rarement. Par exemple, à Leh, lorsqu’il y avait l’électricité, les pannes survenaient plusieurs fois par jour et étaient presque garanties en cas de pluies fortes.

Vous avez de nombreuses prises de courant localisées dans des endroits fonctionnels

Dans de nombreux pays, peu de prises de courant sont installées et elles sont situées à des endroits pas toujours très pratiques, comme sur l’interrupteur des lumières. Vous devez, par exemple, travailler avec votre portable près de la porte.

Vous dormez dans votre propre chambre à coucher

Les Tamangs habitant dans la vallée du Langtang au Népal et qui gèrent des hôtels dorment habituellement dans la cuisine ou encore dans la salle commune, où les voyageurs veillent parfois tard. Les enfants dorment le plus souvent avec les parents.

Les enfants qui fréquentent l’école à Katmandou partagent parfois leur dortoir avec dix ou vingt cinq autres enfants. « It’s difficult but we have to be satisfied with that » nous a dit une écolière en congé.

En Mongolie, les nomades d’une même famille partagent tous une même yourte, laquelle ne comporte qu’une pièce.

Vous pouvez dormir le matin

Vous avez la chance de ne pas vous faire réveiller chaque matin par l’appel à la prière hindoue à 5h, l’appel à la prière musulmane à 6h, la préparation du bois de chauffage ou les bruits de taillage de pierre et de marteaux d’un chantier de construction qui commencent à 6h.

Vous avez une magnifique salle de bain!

Bien qu’étant une pièce relativement petite et occupée seulement pour un temps limité pendant la journée, la salle de bain nord-américaine est un endroit où tous les luxes auxquels nous avons accès convergent pour assurer notre confort. Tout le monde sur la planète ne bénéficie pas de chacun de ces luxes incroyables! Il y a tellement de choses à dire sur les salles de bain, en voici quelques unes.

  • D’abord, vous avez une salle de bain. Les travailleurs népalais de Zanskar Sumdo devaient faire leurs besoins carrément dans la nature. Dans les quartiers pauvres de Delhi, les gens fréquentaient un bloc sanitaire communautaire. En Mongolie on essayait de se cacher des gens que l’on trouvait en faible densité mais partout autour de nous dans une prairie sans obstacles. Pas facile!
  • Votre salle de bain est située à l’intérieur de votre maison et vous en avez peut-être même plus d’une! Dans les montagnes, au Népal, en Inde et en Mongolie, on voyait souvent des toilettes situées à l’extérieur.
  • Votre salle de bain a un toit. En Indonésie, nous avons eu une salle de bain où, lorsqu’il pleuvait, tout était mouillé incluant le siège et le papier de toilette.
  • Votre toilette a une porte. En Mongolie, les toilettes n’avaient parfois que trois murs, vous exposant à la vue des passants dans les moments critiques.
  • Vous avez une toilette sur laquelle vous pouvez tranquillement vous asseoir et même lire si cela vous chante. En Asie comme à bien d’autres endroits, les toilette étaient souvent de type « squat ».
  • Votre toilette est bien fixée au sol. Il nous est arrivé souvent de voir basculer la toilette si on déplaçait notre poids sur une fesse.
  • Vous pouvez mettre votre papier dans la toilette, ce qui n’est pas le cas à peu près partout en Asie.
  • Il y a du papier hygiénique dans presque tous les cabinets et on le trouve à côté du bol. Souvent en Asie il n’y avait pas de papier de toilette et à certains endroits, quand il y en avait, on le trouvait l’extérieur du cabinet et on s’en rendait souvent compte trop tard.
  • Quand vous tirez la chasse d’eau, l’eau ne fait pas que promener les crottes et les papiers, comme c’est souvent le cas en Asie, elle les évacue.
  • Vous avez un lavabo. Nous avons eu plusieurs chambres ayant une salle de bain avec toilette et douche seulement.
  • Votre lavabo est bien fixé au mur. Combien de fois a-t-on vu des lavabos chambranlants qui menaçaient de tomber si on ne faisait pas attention?
  • Vous avez l’eau courante et elle sort du robinet avec pression. Peu de gens au Zanskar ont l’eau courante. Les gens devaient parfois faire de longues distances pour s’en procurer. Et quand l’eau vient jusque dans les maisons, parfois les pompes fonctionnaient mal.
  • Vous avez au moins une douche. Sur la petite île de Pamilacan aux Philippines, puisque l’eau douce était apportée en bateau, on se lavait à l’aide d’un sceau.
  • Vous avez de l’eau chaude. Souvent l’eau chaude était un luxe que même les hôtels ne pouvaient se permettre.
  • L’eau chaude est vraiment chaude et elle vient en quantité suffisante. L’eau qui ne chauffait pas vraiment et les cheveux rincés à l’eau froide en fin de douche sont le lot de bien des asiatiques.
  • Votre douche est séparée du reste de la salle de bain. En Asie, la douche n’était pas séparée. Elle mouillait donc tout le plancher, ce qui fait que nous mouillions nos bas si nous ne mettions pas de gougounes pour aller aux toilettes après que quelqu’un se soit lavé. Nous mouillions nos fesses sur le siège de toilette, quand il y en avait un, si on se douchait sans abaisser le couvercle, et nous perdions un rouleau de papier de toilette si on oubliait de le sortir avant de partir l’eau!
  • Votre toilette ne sent pas les égouts. He oui, souvent c’était le cas!
  • Vous avez peut-être même un bain! Ça c’est un luxe que très peu de gens ont en Asie!

L’eau à laquelle vous avez accès est potable

Camion d'eau potable

Vous avez de l’eau courante et potable qui sort du robinet et elle ne vous rend pas malade! L’eau distribuée dans de nombreux pays est encore impropre à la consommation. Celle entourant les îles est salée. Une part importante de la population consacre donc encore beaucoup d’énergie à se procurer de l’eau potable.

Nous avons vu l’eau être livrée en bateau, à pied ou en camion citernes peu ragoûtants. Elle arrivait en vrac ou par chargements de bouteilles de 18 litres. Elle était d’autres fois remontée d’un puits, recueillie à une source ou dans un ruisseau et transportée à bout de bras.

Et vous, vous lavez votre linge, votre voiture, arrosez vos fleur, remplissez votre piscine avec cette eau potable et pissez même dedans!

Votre cuisine possède un lavabo

L’eau potable arrive jusque dans votre maison par des tuyaux qui déversent autant d’eau que vous voulez dans un lavabo qui se vide à son tour dans les égouts. Au Zanskar on voit peu de lavabos, même dans les cuisines.

Vous avez accès à une laveuse à linge bien branchée

Que ce soit chez vous où au coin de la rue, vous avez toutes les chances de pouvoir laver votre linge et peut-être même de le sécher dans une machine. À bien des endroits en Asie, le lavage du linge se faisait à la main et parfois à la source du village. D’ailleurs, les laveuses devaient être branchées à chaque lavage sur le robinet et le renvoi devait être placé dans la douche qui menaçait de se boucher et de provoquer un dégât d’eau à tout moment.

Vous sentez rarement l’odeur des égouts

Il est rare que vous sentiez des odeurs d’égout puisque ceux-ci sont bien enfouis et les toilettes évacuent efficacement leur contenu. À bien des endroits on pouvait sentir cette odeur nauséabonde plusieurs fois par jour: dans les salles de bain ou dans la rue, que les égouts soient à ciel ouvert ou non.

La route se rend jusqu’à chez vous

À moins que vous n’habitiez en région très éloignée, il est fort probable qu’une route se rende jusqu’à votre porte. Nul besoin de porter de lourdes charges sur de longues distances, de faire appel à des porteurs ou à des ânes pour transporter ce dont vous avez besoin.

Les routes et les conducteurs sont paisibles

Nos routes sont la plupart du temps assez droites, pavées, munies de garde-fous et les conducteurs qui les fréquentent klaxonnent peu, respectent en général le code de la route et les règles élémentaires de sécurité. C’est loin d’être le cas partout sur la planète!

Les routes de terres sinueuses où les accidents peuvent résulter en des chutes spectaculaires, les chauffeurs qui dépassent dans les courbes alors qu’un véhicule arrive en sens inverse, les klaxons largement surutilisés qui dépassent de loin le nombre de décibels tolérables nous ont tous accompagnés tout au long de notre voyage.

La route ne se transforme pas en marre de boue à chaque pluie

La route qui se rend chez vous est en relativement bon état, est fort probablement pavée et ne se transforme pas en marre de boue profonde à chaque pluie, ni en source de poussières lorsqu’il fait sec.

Le trafic est pas si pire, finalement

Dans plusieurs villes, il faut plus d’une heure pour parcourir dix kilomètres et ce, même en dehors des heures de pointe. Les villes les plus agréables pour les touristes (et les locaux) sont celles où l’on a trouvé des solutions pour réduire l’utilisation de l’auto-solo.

Vous avez droit à votre « bulle »

En Asie, dans les rues ou dans les transports, la notion d’espace personnel est très variable. La promiscuité est parfois la seule option disponible: entassement au point où les bousculades deviennent courantes et où les fesses ne peuvent pas se déposer à plat sur un banc.

Vos trottoirs sont droits, en bon état et dégagés

Il n’y a pas de trottoirs partout au Québec. C’est vrai. Mais en Asie, quand ils existaient, les trottoirs étaient souvent considérés comme un espace de rangement, un présentoir ou un stationnement. Sans compter qu’il fallait garder les yeux ouverts car les ils étaient souvent en très mauvais état!

Vous pouvez probablement compter sur votre accès Internet

Vous avez probablement un accès à Internet qui fonctionne, et ce depuis votre domicile. Dans de nombreux endroits, Internet, lorsque disponible, ne fonctionne que lentement et de façon fort intermittente. Rien à voir avec ce qu’on connait chez nous comme problèmes de « lenteur ».

Votre alimentation est incroyablement variée

Dans la plupart des pays que nous avons visité, les menus étaient à peu près les mêmes dans tous les restaurants. Difficile de ne pas s’ennuyer de l’incroyable variété d’ingrédients auxquels nous avons accès ainsi que des mets agençant ces aliments dans une infinité de combinaisons délicieuses!

Vous respirez un air relativement sain

Au Québec, on parle de pollution atmosphérique. Elle existe assurément, surtout lors des jours de smog. Mais il est rare que l’on respire de grandes bouffées d’essence mal brûlée ou qu’on se mouche noir le soir à cause de la poussière qui ne semble jamais retomber.

Vous avez accès à des soins de santé

On aura beau se plaindre, nous habitons la plupart du temps à proximité des soins de santé peu chers. Cette femme souffrait d’un vilain mal de dents depuis deux jours. Pour se faire soigner, elle a dû marcher toute une journée et prendre ensuite un autobus qui l’a menée 10h plus tard à Katmandou.

Une autre femme que nous avons rencontrée dans la vallée du Langtang attendait un bébé. Un mois avant la date d’accouchement prévue, elle a dû marcher pendant des heures pour aller prendre l’autobus (10h) pour Katmandou et attendre la venue de son enfant.

Vous avez accès à des services d’éducation

Vous habitez à proximité d’écoles qui sont gratuites ou coûtent peu cher. Les enfants de la vallée du Langtang, pour aller à l’école, marchaient en une journée un trajet que nous avons mis six jours à compléter. Puis, ils prennaient l’autobus (10h) pour se rendre à Katmandou et y rester six mois.

À Tatopani, dans le Tamang Heritage Trail, à partir de la quatrième année, les enfants fréquentaient l’école du village voisin de Chilime. À chaque matin, ils parcouraient à pied les 5,4 km pour descendre 870 m plus bas. Ils remontaient à nouveau ce chemin pour retourner chez eux le soir. De notre côté, avec nos enfants, nous avions mis deux jours à compléter cette même montée. Si ces élèves n’avaient pas suffisamment de temps pour étudier, ils étaient cependant très en forme!

Au Zanskar, les enfants qui sortaient de la vallée pour aller étudier ailleurs ne retournaient que rarement chez eux puisque la période de relâche en hiver correspondait avec la période de fermeture de la route à cause de la neige. À Padum, Zomba n’avait pas vu son fils Nima depuis sept ans!

Votre environnement sonore est relativement paisible

À bien des endroits, les autorités ne semblent pas avoir encore été informées que le bruit cause un stress si intense à l’organisme que les personnes y étant continuellement exposées ont une longévité moins grande. Des exemples? Des klaxons trop fréquents et trop forts, le bruit incessant des moteurs de voiture présentes en trop grand nombre, la musique qui joue à tue-tête dans les lieux publics, des chanteurs amateurs qui hurlent dans leur micro beaucoup trop fort dans un karaoke, des haut-parleurs qui récitent en boucle des réclames sur des rues commerciales.

Votre environnement physique est relativement propre

Vous me direz qu’on choisit bien de s’acharner à nettoyer son environnement autant qu’on ressent un besoin de le voir propre. Mais quand vous avez de jeunes enfants et que vous n’avez pas les moyens de payer pour des couches… et quand de surcroit l’eau ne se rend pas jusqu’à chez vous et que vous devez la transporter sur votre dos, vous l’utilisez avec parcimonie et la quantité que vous pouvez consacrer à l’hygiène est limitée.

Aussi, si vous avez un certain contrôle sur votre propre demeure, quand vous allez dans les lieux publics, au restaurant ou à l’hôtel vous ne décidez pas toujours de comment les tenanciers ont soigné la propreté des lieux et en particulier des toilettes. Poussière, traces de doigts et de nourriture sur les interrupteurs et les poignées de porte, éclaboussures de brossage de dents dans les miroirs, traces de dégâts sur le plancher, on en a vu pas mal!

Vous êtes relativement libres

Vous bénéficiez enfin d’une grande liberté. Des voyageurs rencontrés et qui étaient passés dans l’ouest de la Chine nous ont racontés que pendant tout leur séjour ils étaient escortés d’un chaperon qui suivait tous leurs déplacements. Dans ce pays, l’accès aux Google, Facebook, Youtube de ce monde est bloqué et les journalistes sont encore emprisonnés pour avoir critiqué le régime.

Comment conclure ce tableau? Ils n’est pas facile de tirer un enseignement juste et sage de ces expériences. Bien entendu, ce que nous avons souvent ressenti comme des « privations » au cours de ce voyage nous a aidé à prendre conscience de bien des privilèges dont nous disposons et que souvent on oublie. Nous avons aussi pu constater combien, à cause de tout ce qui s’avère finalement des luxes, nos vies nord-américaines sont consommatrices de ressources et d’énergie. Nous tenterons désormais de garder à l’esprit que nous faisons partie d’une poignée de privilégiés et d’user de toute ces opportunités pour rendre ce monde meilleur.


4 réflexions sur “Ces petits riens qu’on prend pour acquis

  1. Merci Mélanie pour les réflexions contenues dans ton nouvel article dont les photos pertinentes me rappellent votre voyage au long cours. Une envie de repartir en 2020! Bon début d’année à toi et aux membres ta famille. Odette x

    Envoyé de mon iPhone

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  2. Merci Mélanie pour ton texte.J’aurais tellement apprécié que tu utilises le Nous au lieu
    de Vous .Le Vous devient plutôt accusateur….moraliste ….beaucoup moins efficace pour
    faire passer un si beau message.Relire ton message en y mettant que le Nous sensibilise davantage ton lecteur.
    Merci
    Tante Florence

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  3. Merci Mélanie de ce très beau courriel qui nous rappelle que nous sommes des privilégiés et que nous ne devons pas l’oublier! Bonne année à toute la famille! Céline et Daniel

    Envoyé de mon iPad

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